Contribution du Pôle Écologiste à l’enquête publique relative à l’adoption du Plan des Mobilités en Île-de-France 2030

A

Plan des Mobilités d’Île-de-France : nouveau plan, mêmes politiques, mêmes galères

Propos liminaire

L’objet de cette contribution est la recontextualisation politique des choix effectués par Valérie Pécresse, Présidente de Région ainsi que de l’autorité organisatrice des mobilités (AOM), Île-de-France Mobilités (IDFM). Ceux-ci sont trop souvent décrits par leurs instigateur·trices comme relevant de décisions pragmatiques, obéissant à des considérations « rationnelles ».

Or, par les remarques et propositions que nous énumérons dans le présent document, nous voulons faire ici la démonstration que, soumis aux mêmes contraintes, un exécutif de gauche et écologiste aurait apporté des réponses différentes, et plus adaptées aux enjeux et aux besoins et impératifs des Francilien·nes. Nous tenterons également d’expliquer pourquoi les choix faits, ou à défaut les actions réellement mises en place par l’exécutif régional, peuvent même entrer en contradiction avec les objectifs affichés.

D’ailleurs, nous partageons la plupart des constats dressés par le projet du présent PDMIF : les politiques publiques de la Région et de l’AOM doivent permettre la réduction rapide des émissions de gaz à effet de serre (GES) et des polluants atmosphériques, mais aussi du trafic motorisé en tant que tel (pour des questions de congestion, d’espace public et d’artificialisation des sols, de bruit, de sécurité routière, etc.), tout en développant les opportunités de déplacement en commun, actifs, et/ou partagés. La mise en accessibilité totale du réseau et la réduction drastique de l’accidentologie sont d’autres objectifs que nous partageons tout naturellement.

Les urgences sociales, climatiques, sanitaires-environnementales et économiques auxquelles font face les Francilien·nes impliquent en effet de concevoir des mobilités qui soient bon marché, justes, équitables, inclusives et écologiques. Telle est notre ambition pour la première compétence de la collectivité.

Or, les décisions en matière d’aménagement des infrastructures et de réglementation, et surtout en matière budgétaires prises par la majorité régionale depuis 10 ans témoignent, au choix, d’un défaut de conscience de l’ampleur de la 

tâche à accomplir, ou alors d’une certaine hypocrisie, dans la mesure où les actions sont parfois loin (voire contradictoire) des promesses, réduites à l’état d’annonce ou d’opération de marketing

Enfin, rappelons que la France doit avoir atteint la neutralité carbone dans 25 ans. Chaque tonne de carbone que nous tardons à économiser coûtera deux fois plus d’efforts demain. Le rythme de décarbonation doit être soutenu ; alors, s’il est possible d’avoir un débat sur les ambitions quantitatives affichées (-26% d’émissions de GES), il faut l’avoir en connaissance de cause : le PDUIF 2010-2020 avait raté ses objectifs en la matière (-15% contre -20% en ambition). L’urgence implique d’être prudent·es.

Cette contribution contient des remarques, propositions et explications du Pôle Écologiste – certaines proviennent des amendements déposés en séance plénière du Conseil Régional (en particulier lors de l’élaboration du PDMIF), de la Commission Permanente de la Région et du Conseil d’Administration d’IDFM. Tous rejetés par la majorité.

Les objectifs

Nous proposons de revoir les objectifs du Plan de mobilités 2030 : -25% de déplacements automobile ; -50% d’émissions de gaz à effet de serre et 20% de part modale du vélo.

En effet, le secteur des transports représente la 1ère source d’émission de GES en France (32 % en 2022) et c’est le seul secteur où les émissions ne diminuent pas. En vertu de la loi européenne sur le climat, les pays de l’UE doivent réduire leurs émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici 2030. L’objectif étant la neutralité carbone à l’horizon 2045 pour la France. C’est pourquoi se fixer un objectif de baisse de 50% des émissions de GES permet à la fois d’être cohérent avec les ambitions climatiques européennes et de prendre en compte le retard pris spécifiquement par ce secteur.

Autre objectif qui manque d’ambition, celui concernant le nombre de déplacements motorisés. En effet, l’objectif semble modeste au regard des ambitions sur les émissions de GES et on sait que même si les progrès sont faits sur les motorisations, il est important de viser une baisse de la circulation motorisée 

individuelle qui est facteur de pollution de l’air (il faut tenir compte de la pollution hors échappement) d’artificialisation des sols, d’emprise au sol prenant la place aux piétons et autres modes durables, d’insécurité routière et de bruit. Viser une baisse 

de la circulation de 25% ne semble pas impossible ; ainsi la circulation automobile a baissé de 20% à Paris pendant le premier mandat de B. Delanoe.

Dans son scénario volontariste sur l’évolution de la pratique du vélo, l’ADEME projette une part modale vélo en Île-de-France à l’horizon 2030  à hauteur de 28,5% à Paris, 24% en première couronne et 21% en grande couronne. Ce scénario se fonde sur l’évaluation du potentiel de pratique du vélo compte tenu des contraintes de distances et de charge. Ainsi, viser 20% de part modale du vélo est un objectif à la fois ambitieux et réaliste.

Les transports en commun

L’axe 1 du document proposé témoigne d’une ambition explicite universellement partagée. En l’espèce, il est fait promesse d’augmenter le volume et la performance des réseaux mass transit, de surface, de cars « express » et du transport à la demande dans les territoires peu denses. Objectifs louables, mais que nous pensons antagonistes avec le budget 2025 de la Région Île-de-France, auquel la gauche et les écologistes se sont fermement opposés. Y furent votées des baisses d’investissements inédites par leur ampleur : 30 millions d’euros en moins sur les liaisons ferroviaires, autant sur les tramways, 55 millions de coupes pour le financement du métro (soit près de 60% du total des investissements !), 65 millions de moins pour le développement des sites propres pour autobus, et la disparition pure et simple pour 2025 du programme d’aménagement de voiries pour ces derniers… Voilà la « politique de la hache » dont se vante la Présidente de Région. Et lorsqu’on connaît la situation réelle dans les transports, les retards interminables, les trains bondés, les annulations de dernières minutes, toutes ces heures perdues et ce stress pour nos concitoyen·nes, on reste bouche bée devant de tels choix budgétaires. Plus encore lorsqu’on nous promet qu’en dépit de cela, on affiche de telles ambitions…

Au total donc, on perd en une seule année près d’un quart des crédits de paiement investis par la Région dans les transports (de 981 à 770M€). Les Écologistes appellent au sursaut et demandent au contraire un plan d’investissements massif pour adapter les transports régionaux aux nouvelles réalités socioéconomiques, démographiques et environnementales. Nous pensons en particulier qu’une priorité doit être donnée aux lignes de mass transit existantes 

(RER, Transilien, Métro), surtout en matière de renouvellement du matériel roulant, de réparation des infrastructures et d’amélioration des circulations au quotidien par une fiabilité accrue.

Par ailleurs, face aux besoins croissants et aux contraintes matérielles et budgétaires, il est temps de repenser l’aménagement et l’urbanisme régional pour permettre la démobilité. Il s’agit, plutôt que d’adapter l’offre à la demande, de maîtriser cette dernière, en réduisant les besoins de déplacements des habitant·es.

L’Île-de-France s’est structuré historiquement par une concentration très forte de l’emploi : 50% des postes sont localisés dans 19 communes (soit 1,5% de l’ensemble des communes) et les transports en commun sont actuellement conçus au service de cette concentration économique, venant compléter l’offre routière pour les automobiles par des transports en commun domicile-travail, sans la remplacer pour autant. En parallèle, de nouvelles offres de transport, qui ne correspondent que très marginalement aux demandes locales, renforcent le phénomène des “villes dissociées”, c’est-à-dire des villes où les habitant·es ne travaillent pas et où les travailleurs·euses n’y habitent pas. Cela contribue aux phénomènes de « ville-dortoir » et des mouvements dits « pendulaires ».

Les projets de transport en Île-de-France renforcent la dynamique de centralisation très forte des activités économiques. Suite au covid et à la désaffection inédite du plus gros quartier d’affaires européen (La Défense), les investisseurs et entreprises privilégient désormais les bureaux plus petits, mais très bien situés dans l’hypercentre de Paris. Cette re-concentration ou hyper-concentration des emplois fait exploser les inégalités territoriales dans la région et éloigne encore plus les Francilien·nes de leur travail.

Le Plan des Mobilités (PdM) devrait œuvrer pour faciliter les déplacements quotidiens des Francilien·nes en s’adaptant précisément à leurs besoins de déplacement en lien avec une nouvelle conceptualisation du territoire cadrée par le SDRIF-E. La priorité doit être donnée aux bassins de vie qui n’ont quasiment pas d’offre de transports en commun et au développement de nouvelles solutions de mobilité adaptées, principalement en surface : Bus à Haut Niveau de Service de proximité, tramways ou bus de liaison vers des radiales. Ainsi, le PdM que nous défendons – conformément aux objectifs affichés dans le SDRIF-E de polycentrisme et de rééquilibrage à l’échelle de la région – accompagne la transition des mobilités vers davantage de proximité, la démobilité et le rapprochement domicile-travail (connexion entre les emplois locaux et les transports).

L’offre de transport doit donc évoluer pour répondre plus finement aux besoins des habitant·es. Le développement de transports de surface (bus de proximité, Bus à Haut Niveau de Service, tramways ou tram-train) dans les territoires est une solution pour connecter les habitant·es aux “nouvelles polarités”. Par exemple, Transport en Commun en Site Propre (TCSP) du Barreau de Gonesse est un BHNS inauguré en 

2016 qui permet un maillage du territoire et une offre de service conforme aux besoins de déplacement quotidien des habitant·es, c’est aussi le cas sur les lignes « Tzen » qui doivent continuer de se développer. La mise en œuvre de ces lignes ne doit cependant pas être un argument pour abaisser des fréquences, voire supprimer des lignes de bus existantes, comme c’est souvent le cas – sans parler des (très) nombreux « bus fantômes », que les opérateurs de grande couronne sont censés faire rouler, mais qui ne passent simplement jamais… Les ajustements d’offres, qui vont toujours vers la réduction, mettent un frein à la dynamique de complémentarité des offres de transports qui, en se chevauchant sur de divers périmètres, permettent réellement de proposer une alternative crédible et attractive à la voiture. 

Les mauvaises priorités, qui ne répondent pas aux usages du quotidien et sont des gouffres financiers, doivent être définitivement abandonnées (ligne 17 Nord, gare de Gonesse, ligne 18 Ouest, ligne 19) pour permettre aux territoires délaissés et/ou oubliés de voir arriver des aménagements essentiels (prolongement du T7 jusqu’à Juvisy-sur-Orge, prolongement du T11 entre Sartrouville et Épinay et entre Le Bourget et Noisy-le-Sec par exemple). En outre, l’optimisation du réseau existant est également une nécessité et le projet de création de ligne S (liaison directe de Malesherbes-Melun à Paris avec des missions directes entre Juvisy et Paris) doit être mise en œuvre le plus rapidement possible.

De manière générale, les usager·es vivent une situation très dégradée dans les transports suite aux décisions politiques de Valérie Pécresse de réduction des fréquences et de sous-investissements dans la maintenance. Le PdM doit fixer des objectifs clairs, lors des pointes, mais aussi des heures dites creuses (en milieu de journée, le soir et le weekend), et se donner les moyens d’envisager une hausse de l’offre pour tendre vers 120% dans les années à venir. Le renouvellement rapide du matériel roulant est le plus à même d’améliorer la qualité de service. La priorité doit être donnée aux lignes les plus fréquentés par les usager·es du quotidien et les plus en souffrance aujourd’hui (RER A, B, C et D, T1 et ligne M13), dans une logique de justice sociale. L’arrivée des rames rénovées ou neuves (notamment les MI20 et les MP14) doit être complétée par des travaux massifs d’entretien et de modernisation du réseau ferré afin de garantir, à long terme, une qualité de service optimale. 

Proposition n°1 du Pôle Écologiste au projet de PDMIF
Priorité aux lignes existantes & choc de l’offreRevoir l’action 1.1. du Plan de mobilités 2030, pour donner la priorité aux lignes de RER, trains et métros existantes, renoncer aux projets inutiles et pour enclencher le choc de l’offre

L’action 1.1. vise à “développer le réseau de mass transit et en conforter la fiabilité et la résilience à l’amélioration”. Cette action vise essentiellement le développement de nouvelles offres de transports avec le Grand Paris Express et les projets prévus au CPER. Si certains de ces projets sont nécessaires, d’autres sont plus contestables, comme les lignes 18 Ouest et 17 Est du Grand Paris Express.Or les transports en commun en Île-de-France souffrent actuellement sur les lignes existantes, à la fois très dysfonctionnelles et sous-exploitées, notamment en termes de fréquence et d’amplitudes horaires.Il convient donc de revoir cette fiche action pour que la priorité soit donnée aux lignes de mass transit existantes (RER, Transilien, Métro). Il s’agit en particulier de renouveler le matériel roulant, de réparer les infrastructures et faire les investissements nécessaires pour améliorer leurs circulations au quotidien.Il est aussi nécessaire d’inclure ce qu’on appelle un “choc de l’offre”, c’est-à-dire augmenter sensiblement l’offre en termes de fréquence et d’amplitudes horaires, pour vraiment inciter au report modal. Cela signifie par exemple de garantir entre 6h et 23h une fréquence de 15 minutes minimum, pour les transiliens et RER, quelle que soit la branche. C’est cette politique qui est appliquée avec beaucoup de succès en Suisse et qui fait le grand succès du train au quotidien.
Proposition n°2
Tramway T11Inscrire au Plan des mobilités en Île-de-France 2030, le lancement opérationnel du prolongement du tram express T11 à l’Ouest, entre Épinay-sur-Seine et Sartrouville, et à l’Est, entre le Bourget et Noisy-le-Sec
L’ouverture du T11 express entre Épinay-sur-Seine et le Bourget en 2017 a permis de renforcer l’offre de transport dans le Nord du département de la Seine-Saint-Denis. Il est essentiel de s’engager dès l’année prochaine dans un calendrier de réalisation de l’extension Ouest de cette ligne afin de desservir les bassins de population d’Argenteuil et Sartrouville trop faiblement pourvus en transports en commun, conformément à l’engagement de la Présidente d’Ile-de-France Mobilités dans Le Parisien du 29 novembre 2023 lors des annonces sur le projet de ligne 19 du métro. Ce prolongement jusqu’à Sartrouville pourrait compter 300 000 voyageurs par jour et permettre de faciliter les trajets de banlieue à banlieue. À l’origine, la Tangentielle Nord devait permettre à Argenteuil, 3ème commune la plus peuplée d’Île-de-France et Sartrouville, 2ème commune des Yvelines, d’être connectée à la Seine-Saint-Denis à l’Est et ses bassins d’emplois. En outre, les extensions du T11 ont un enjeu majeur d’interconnexion : le prolongement à l’Ouest permet de connecter les habitant·es au RER A, aux transiliens L et J et au tram T2. Pour renforcer cette connexion au réseau, le prolongement à l’Est, entre le Bourget et Noisy-le-Sec, est stratégique afin de relier les différentes communes de la ligne à des infrastructures structurantes du réseau, comme les métros 5 et 15, le RER E, le T1 et le TZen 3. Ce projet doit être une priorité politique puisqu’il permet, rapidement et à un coût maîtrisé, d’offrir à des populations en manque de solution de transports en commun – principalement dans le Val-d’Oise – l’accès à une ligne qui assure une desserte fine du territoire et donne un large accès au réseau structurant de notre région.
Aujourd’hui, les habitant·es de ces territoires sont toujours dans l’attente et sans calendrier sur l’arrivée de ce projet. C’est pour répondre à cette forte attente que nous déposons cet amendement qui vise à réaffirmer le portage politique des prolongements du T11.
Proposition n°3
BillettiqueInscrire la simplification de la billettique dans le plan des mobilités 2030, avec en particulier, la prise en compte des cartes bancaires dans le réseau.
Les files d’attente restent longues aux gares et grandes stations, car beaucoup de visiteurs n’ont pas accès au Pass Liberté + ou sont réticents à utiliser leur smartphone. Il faut prévoir cette grande facilité de paiement pour les usagers ponctuels, particulièrement nombreux en Île-de-France (tourisme de loisir, d’affaire, transit…)

Transition écologique du matériel roulant et réduction des impacts sanitaires

La transition écologique et énergétique du matériel roulant passe par un panachage des énergies mobilités afin de réduire la dépendance à un modèle et gagner en résilience. Par autonomie stratégique et pour réduire l’impact des batteries du matériel roulant électrique, il est nécessaire de maximiser les origines de production du matériel roulant et de ses composants en Europe. Pour les mêmes raisons, la région doit expérimenter les bus hydrogène, à condition que la production de cette énergie se fasse dans un cadre vert et renouvelable et que toute la chaîne de valeur soit maximisée pour aller vers la décarbonation. Les bus électriques doivent être complétés, à un niveau raisonnable au regard des capacités de production du territoire francilien, par des bus au bioGNV. La production de cette énergie doit être planifiée pour éviter le détournement des terres et la justification de la surproduction de déchets. 

La presse révèle en 2023 l’importance de la pollution de l’air dans le métro souterrain. Les quais sont plus pollués que l’air extérieur, la concentration en particules ultrafines est 19 fois supérieure aux seuils de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Il est urgent de prioriser le remplacement complet des garnitures de freinage sans attendre leur obsolescence, réévaluer la pollution des métros sur pneus et améliorer les systèmes d’aération. L’objectif se doit d’être ambitieux : nous demandons la purification de 100 stations d’ici à 2028. 

Les politiques piétonnes

Un angle trop souvent mort des politiques publiques des mobilités est celui de la marche, premier « moyen de locomotion » des Francilien·nes. Le présent PDMIF ne fait malheureusement pas vraiment exception, en témoigne la singulière légèreté de l’axe associé au sein du document. Pourtant, à l’échelle nationale, 24% des déplacements quotidiens se font exclusivement à pied. Elle doit prendre une position centrale dans le nouveau PdM. Qui plus est, la pratique de la marche à pied quotidiennement permet de répondre au besoin de pratiquer une activité physique régulière : les avantages sont pléthores. L’OMS préconise d’ailleurs 30 minutes d’activité physique par jour pour entraîner des répercussions positives sur la santé. Elle permet une réduction de la sédentarité, de l’obésité, et prévient les maladies cardio-vasculaires.

Il s’agit d’un mode très complémentaire avec les modes de transports collectifs, car la marche à pied est souvent utilisée lors d’un déplacement : en début de parcours pour se rendre à un point d’arrêt de transport ; au milieu du parcours pour effectuer une correspondance ; à la fin du parcours pour se rendre à sa destination finale. Réaménager les espaces en faveur des piétons revient donc à 

améliorer les performances du système de transports alternatifs à la voiture particulière basé sur la multimodalité, c’est-à-dire l’utilisation combinée de plusieurs modes pour se rendre à une destination donnée. De plus, la marche possède le grand avantage de la fiabilité du temps de parcours et reste le mode le plus pertinent pour des déplacements inférieurs à deux kilomètres.

Nous saluons toutefois la volonté de mise en place de plans locaux en faveur de la mobilité piétonne. Cependant, le PDMIF préconise de laisser leur conception aux mains des EPCI ; or, on peut se demander si ces unités sont les plus cohérentes pour être cheffes de file en la matière. Certaines politiques publiques, du fait de la structure politique même de ces collectivités, peinent à aboutir à des ensembles cohérents – à l’image des PLUi. Toutefois, d’autres fonctionnent bien davantage. En l’occurrence, l’échelle des distances offertes par la marche pourrait nous faire envisager l’échelle de la commune comme plus pertinente. Il faudra néanmoins, et ce, peu importe la collectivité implémentatrice, prendre gare à “l’effet frontière”, particulièrement marqué autour du Périphérique parisien. Cet espace de passage est souvent hostile aux piétons, du fait de l’absence de coordination permettant une vraie continuité piétonne.

L’on peut également regretter l’absence complète de programmes dédiés au budget de la Région, qui limite de facto les marges de manœuvre pour le déploiement d’une politique piétonne ambitieuse.

Enfin, les enjeux d’accessibilité sont abordés et nous nous en réjouissons, mais ils devraient être traités de manière plus centrale : l’inaccessibilité des espaces piétons est plus brutale encore que celui du réseau de transports. Elle assigne à résidence, même de la vie de proximité ; une attention toute particulière doit ainsi être portée à l’adaptation des trajets en cas de travaux de voirie. 

Proposition n°4
Piétons : Rue aux écolesAjouter une action dédiée au développement des rues aux écoles

En Île-de-France, si 41% des déplacements quotidiens se font exclusivement à pied, la marche est une mobilité délaissée depuis longtemps par les politiques publiques. La pratique de la marche à pied quotidiennement permet de répondre au besoin de pratiquer une activité physique régulière. L’OMS préconise d’ailleurs 30 minutes d’activité physique par jour pour avoir des répercussions positives sur la santé. Elle permet une réduction de la sédentarité, de l’obésité, et prévient les maladies cardio-vasculaires.À Paris, les “rues aux écoles” rencontrent un vif succès. Les « rues aux écoles » consistent en la piétonisation des voies aux abords d’écoles maternelles et primaires. Elles ont vocation à sécuriser le chemin maison-école pour les enfants, mais aussi à lutter contre la pollution.Des barrières amovibles sont installées lorsque cela est possible.. Elles permettent le passage des véhicules de secours et des services (collecte des ordures ménagères, etc.) mais interdisent le passage des véhicules motorisés, et lorsque nécessaire l’accès à des parkings riverains ou d’importants besoins en livraison. Certaines « rues aux écoles » sont également accompagnées d’aménagements spécifiques, comme des végétalisations.Les rues aux écoles encouragent la mobilité active des élèves et de leurs parents, et participent au maillage piéton des centres-villes et villages.

Mise en accessibilité et inclusivité des mobilités

Il s’agit d’un sujet primordial pour l’égalité des droits et des opportunités : sans possibilité de se déplacer, impossible d’accéder aux loisirs, à l’emploi, aux droits politiques, à la santé, à l’éducation, à une vie sociale et citoyenne épanouie. Le nouveau Plan des Mobilités doit donner la priorité à la mobilité inclusive et penser la mobilité sous l’angle des usages, et non pas uniquement des déplacements. Il s’agit de répondre aux besoins de chacun·e et en particulier les plus vulnérables socialement et économiquement. Le droit à la mobilité, tant à l’accès qu’au choix, est donc primordial et passe nécessairement par un maillage plus fin du territoire et une meilleure prise en compte du développement de l’offre de transport sur les trajets où il y a réellement de la demande. D’autant que, de l’aveu même du document, 41% des Francilien·nes sont concerné·es par une perte de mobilité.

Les solutions de mobilités ne doivent oublier personne et être accessibles à toutes et tous. Aussi, une évolution de la tarification, plus solidaire, est nécessaire pour garantir l’accès des plus précaires à tous les transports en commun. En outre, le réseau doit accélérer son calendrier de mise en accessibilité pour les Personnes à Mobilité Réduite (PMR) et tous les chantiers de modernisation des gares doivent inclure des aménagements largement accessibles – de même que la quantité de stationnements réservés adéquate. Le précédent des travaux de modernisation de la gare d’Austerlitz menés entre 2020 et 2025 pour 50 millions d’euros d’argent public et n’incluant pas de mise en accessibilité au prétexte que la ligne 5 n’est pas inscrite au Schéma Directeur d’Accessibilité (SDA) ne peut plus se reproduire à l’avenir.

Nous regrettons qu’en dépit de la grande cause régionale qui fut celle du handicap l’année dernière, des assises du « métro pour tous » organisées à l’Hôtel de Région, et de l’objectif ici affiché, le budget alloué en 2025 aux investissements de mise en accessibilité du réseau passent de 24M€ à seulement 15M€ pour 2025. Pourtant, des mots même de la Présidente, la mise en accessibilité du réseau historique de métro coûterait plusieurs milliards… Attention également aux interconnexions du Grand Paris Express (GPE) avec les lignes existantes : on nous promet des nouvelles lignes 100% accessibles, mais pourra-t-on y accéder depuis le réseau existant ?

À ces fameuses « assises », on a annoncé des études pour la mise en accessibilité de la ligne 6. Or, de l’aveu même du PDMIF, « Une étude d’opportunité pour la mise en accessibilité de la ligne 6 du métro aux personnes en fauteuil roulant a été réalisée en 2020 » (page 191). Et c’est sans compter sur les études réalisées par l’opérateur depuis au moins 2012. Pourquoi alors réaliser de nouvelles études ? La ligne 6 aurait-elle changé entretemps ? Pour rappel, du fait de sa longue partie aérienne, il s’agit de la ligne la plus facilement adaptable ; voyant ce faible niveau d’engagement et de volonté politique, on imagine alors ce qu’il en sera pour l’adaptation des lignes les plus complexes…

Nous saluons l’emphase mise sur l’accompagnement adapté en gare et l’information voyageurs adaptée. En revanche, la multiplicité des opérateurs permise par l’ouverture à la concurrence progressive de l’ensemble du réseau de transports peut rendre plus complexe la mise en place d’un service cohérent, continu après chaque changement de ligne, et véritablement opérationnel. Il faudra demeurer vigilants. À noter toutefois que ces solutions nécessitent une présence permanente de personnel en gare – que nous appelons de nos vœux, à contre-courant de la tendance. On nous explique en effet que les nouveautés billettiques permettent de faire des économies sur ce point, en oubliant que les personnels en gare ne servent pas qu’à vendre des billets… D’ailleurs, pour des soucis d’information, de service à la personne, de sécurité, d’accompagnement, de qualité de service, etc, nous appelons au renforcement du personnel systématiquement présent, dans toutes les gares. Une des raisons du succès relatif des Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) 2024 dans les transports était indéniablement liée à cette présence accrue pour accompagner les usager·es.

Enfin, difficile de ne pas aborder le cas des PAM. La régionalisation progressive est indéniablement compliquée, et la dégradation du service a été une réalité, bien qu’on puisse observer une dynamique d’amélioration. Nous pensons que ce service doit être conçu comme permettant l’accès au droit à la mobilité à défaut de pouvoir utiliser le reste du réseau, ce qui implique un accès plus large (publics concernés), meilleur marché (un trajet ne devrait pas être plus cher que sur le réseau 

classique, soit le prix d’un ticket), et surtout, fiable. On observe de trop nombreuses annulations de dernières minutes, le système d’inscription et de réservation demeure complexe, le système des “trajets prioritaires” a été abandonné, etc. À date, ce service n’est pas à la hauteur des besoins. Or, là encore, la Région a diminué cette année le budget alloué… alors qu’il faudrait fortement l’augmenter.

Proposition n°5
Accessibilité du métro parisienInscrire dans le Plan de mobilité 2030 : l’ambition du “métro pour tous et toutes” et en particulier la mise en accessibilité PMR de la ligne 6 à l’horizon 2030une étude visant à la suppression des portillons du métrol’augmentation sensible de la présence humaine, en gare et dans le métro, pour accompagner entre autres les usager.es en situation de handicap.

Politique cycliste

Le cyclisme est évidemment central dans notre vision de la mobilité : c’est un moyen de transport fiable (si l’infrastructure est adaptée), bon marché, inclusif (lorsqu’on inclut les solutions adaptées, qu’elles soient cargo, PMR, VAE, etc), moins dangereuse que les véhicules motorisés, écologique, et actif, permettant une activité physique régulière. Par ailleurs, c’est le transport le plus adapté pour les moyennes distances, soit la plupart des trajets effectués dans notre région. En plus, il permet la création d’emplois non délocalisables, qualifiés ou non, et donc une réindustrialisation équitable du pays.

La pratique du vélo est donc une alternative fiable et crédible à la voiture pour la plupart des trajets et notamment les déplacements entre le domicile et le travail. Depuis la pandémie de Covid, l’usage du vélo croît très rapidement et est en hausse de 28% sur un an entre 2020 et 2021. Alors que 60% de ces trajets sont effectués en voiture, contre 5% à vélo, les politiques publiques doivent approfondir au plus vite 

le soutien à la pratique du vélo. Ainsi, chacun·e peut faire des économies sur son budget transports, réduire son bilan carbone et préserver une bonne santé. 

Il faut se fixer des objectifs plus ambitieux que ceux fixés dans le PDMIF actuel avec -25% de déplacements automobile, -50% d’émissions de gaz à effet de serre et +20% de part modale du vélo à l’horizon 2030. 

Pour faciliter la pratique dès le plus jeune âge, des opérations de don de vélos aux lycéens doivent être organisées partout en Île-de-France, afin de proposer une alternative à la voiture individuelle et de donner des bonnes habitudes dès l’adolescence. La coopération avec les départements et les communes devrait également pouvoir élargir la pratique aux collégiens et écoliers : plus on s’habitue jeune au vélo, plus on est susceptible de continuer à l’utiliser régulièrement.

D’ailleurs, en matière de coopération intercollectivités, il devient indispensable d’assumer le bâton en plus de la carotte : il ne suffit plus d’inciter les collectivités à participer aux efforts régionaux de déploiement du réseau VIF, il est également temps de contraindre les récalcitrants.

Nous saluons les ambitions affichées de développer les maisons du vélo, les services de location courte durée et d’étendre le service Véligo et les aides à l’achat. Il faut toutefois sur ce dernier point aborder une perspective d’économie circulaire, et structurer des filières de dons, prêts, réemploi, et recyclage des vélos, en plus des simples aides à l’acquisition. De même, nous sommes surpris·es de ne trouver nulle part dans le document de référence au dispositif régional d’aide à l’achat de vélos adaptés aux personnes en situation de handicap. Ces aides sont pourtant bien souvent indispensables, étant donné la précarité relative des publics concernés et le coût moyen de ces équipements. Il est indispensable de déployer ce dispositif à son plein potentiel : à ce jour, quelques dizaines de demandes sont faites par an seulement.

La décarbonation du secteur du transport en Île-de-France est un objectif qui doit mener vers une vraie politique en faveur du vélo. Ce mode de transport doit être considéré sous l’angle de sa complémentarité avec le réseau de transports en commun : il permet d’augmenter fortement l’aire d’influence d’une gare pour une meilleure attractivité de celle-ci. La réussite de la politique en faveur du vélo en Île-de-France est conditionnée à un déploiement ambitieux des équipements de stationnement, notamment sécurisés. 

Dans son scénario volontariste sur l’évolution de la pratique du vélo, l’ADEME projette une part modale vélo en Île-de-France à l’horizon 2030 à hauteur de 28,5% à Paris, 24% en première couronne et 21% en grande couronne. Ce scénario se fonde 

sur l’évaluation du potentiel de pratique du vélo compte tenu des contraintes de distance et de charge.

Les gares et ses aménagements doivent donc se mettre au service de l’intermodalité pour réellement permettre aux mobilités de se compléter. À travers le PdM, cette ambition doit prendre une forme concrète tant avec les aménagements (stationnement vélo sécurisé et bien proportionné en gare) que dans les outils facilitateurs (billettique, applications…)

Usage partagé de l’automobile

Alors que la voiture individuelle est responsable de 15% de l’ensemble des émissions de GES de la France, 80 à 85% des véhicules circulant en Île-de-France ne transportent que la personne au volant. Ce PdM doit prendre le tournant de l’urgence climatique et sanitaire et mettre en œuvre des politiques en capacité de réduire considérablement la place de la voiture en Île-de-France. En tant qu’AOM, Île-de-France Mobilités doit mener des politiques réellement incitatives pour réduire le nombre de déplacements en voiture individuelle dans une position d’autosoliste. 

Les véhicules motorisés doivent être moins nombreux sur les routes, tout en permettant le déplacement de plus de personnes. Les voies dédiées au covoiturage et aux mobilités partagées doivent donc se généraliser partout où cela est possible en Île-de-France, sans être le prétexte aux extensions de voies existantes. La pérennisation des voies dédiées aux transports des personnes accréditées lors des Jeux Olympiques et Paralympiques sur le boulevard périphérique parisien est une première étape importante qui doit rapidement se développer sur tout le territoire.  L’accès à ces voies de covoiturage doit être réservé à tous les véhicules occupés par deux personnes ou plus, incluant les taxis (même à vide), les bus, les véhicules des services de secours et les ayants-droits des véhicules personnels des Personnes à Mobilité Réduite (PMR). Cette politique doit s’accompagner d’une réduction de la vitesse sur les voies rapides afin de réduire la pollution de l’air (le passage de 70 à 50 km/h permet une baisse de 20% des émissions d’oxydes d’azote et de particules fines PPM10), le bruit qui pèse sur la santé des riverain·es particulièrement exposé·es et la consommation de carburant des véhicules.

Île-de-France Mobilités doit activer tous les leviers possibles pour favoriser ce nouvel usage de la route en accompagnant la pratique du covoiturage (aménagement d’aires, incitation à la pratique, mise en relation entre personnes en recherche de mobilités partagées) et ainsi défendre un transport plus solidaire et vecteur de lien social. L’expérimentation annoncée des « lignes » de covoiturage peut ainsi être une bonne idée si l’action est à la hauteur de l’ambition, de même que 

l’intégration sur l’application d’IDFM, les avantages tarifaires ou les solutions particulières à l’échelle d’un site ou d’un pôle d’emplois.

En outre, la transition énergétique nécessaire pour les voitures individuelles ne peut conduire à un remplacement de l’intégralité du parc automobile existant (5,6 millions de véhicules en Ile-de-France). Les aides publiques doivent être priorisées et/ou bonifiées vers les personnes les plus dépendantes de ce mode de déplacement. 

La multimodalité et l’intermodalité

Comme mentionné préalablement, l’intermodalité est au cœur de la robustesse et de la fiabilité du réseau dans son ensemble, et permet de renforcer individuellement chaque mode de transport emprunté. L’aménagement des pôles nodaux existants est un objectif affiché que nous partageons ; toutefois, à nouveau, le budget alloué en 2025 est loin de l’ambition : en 2024, la Région avait prévu 105M€ d’investissement dans ces pôles intermodaux. En 2025, Valérie Pécresse prévoit… 36M€. Or, l’ouverture de nouveaux nœuds avec le déploiement du GPE devrait mobiliser davantage de crédits.

L’aménagement annoncé des espaces publics autour de ces nœuds, notamment avec des équipements d’intermodalité (parkings sécurisés pour vélo par exemple) est une bonne nouvelle, à l’image du développement des parkings-relais en bordure d’agglomération. En espérant que le budget prévu au rabais puisse être à la hauteur des promesses faites – ce dont nous doutons.

Proposition n°6
Multimodalité
Inclure dans le Plan de mobilité une action visant la multimodalité : pour tous les projets d’infrastructure lourds, il faut favoriser l’intermodalité au niveau des pôles d’échanges, avec des cheminements piétons, du stationnement vélos et des gares routières bien dimensionnées et positionnées. De plus, il est nécessaire de donner plus de possibilités pour le voyage en train avec un vélo en dehors des heures de pointe en travaillant avec les opérateurs à un cadre plus précis sur cette pratique sans entraver le fonctionnement normal des trains. 
La pratique du vélo est une alternative fiable et crédible à la voiture pour tous les trajets et notamment les déplacements entre le domicile et le travail. Depuis la pandémie de Covid, l’usage du vélo croît très rapidement et est en hausse de 28% sur un an entre 2020 et 2021. Alors que 60% de ces trajets sont effectués en voiture, contre 5% en vélo, les politiques publiques doivent approfondir au plus vite le soutien à la pratique du vélo. Ainsi, chacun·e peut faire des économies sur son budget transports, réduire son bilan carbone et préserver une bonne santé.À l’horizon 2030, 98 % des habitants de la métropole du Grand Paris auront accès à une gare à moins de 2 km et 75% des habitant·es de la région vivent à moins de 6 km d’une gare. Le vélo, mécanique ou à assistance électrique, est une alternative fiable à la voiture à condition que les aménagements le permettent. Le Plan des Mobilités en Ile-de-France 2030 doit garantir les continuités cyclables et le développement des voies vertes. Le Plan des Mobilités en Ile-de-France 2030 doit également intervenir pour renforcer l’intermodalité dans les gares. Cela passe par des aménagements : stationnements vélo sécurisés et bien proportionnés en gare, renforcement des voies cyclables dans les 200 mètres autour des gares, transformation des places de stationnement pour voitures (parking ou dépose-minute sur voirie) en espaces dédiés aux modes actifs (marche ou vélo). Cela passe également par des outils facilitateurs comme la billettique ou les applications. De même, cela nécessite de privilégier l’aménagement de services publics (crèches, aide à la personne, maisons du vélo…) sur des espaces purement commerciaux et de limiter le nombre et la taille des commerces qui pourraient être implantés pour ne pas transformer les gares en centre commercial et pour ne pas désavantager les commerces de centre-ville, promouvant notamment les productions locales.

La route et la voirie

On persiste et signe : le système du tout-voiture est catalyseur des inégalités et une des sources profondes de la crise environnementale actuelle, tant d’un point de vue climatique que de biodiversité, de pollution atmosphérique ou encore de changement d’usage des sols et d’étalement urbain. Nous pensons que l’échelon régional, seul niveau en capacité de planifier et de moderniser l’organisation des voiries, doit étendre ses compétences sur les routes.

Le secteur des transports est responsable du tiers des émissions de Gaz à Effet de Serre de la France (en hausse de 9% depuis 1990) et 94% de ces émissions sont imputables au transport routier. En parallèle, la pollution de l’air est la cause chaque année de 48 000 décès en France (1 décès sur 10 en Ile-de-France) et génère des allergies respiratoires pour 30% de la population. Pourtant, le respect des seuils d’émission de GES et de particules fines de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) permettrait d’éviter 7900 décès par an en Ile-de-France. 

Conformément aux alertes très claires du Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC), qui indiquent que « la fenêtre d’action pour garantir un avenir vivable et durable pour tous se referme rapidement », et à la Stratégie National Bas Carbone, qui fixe les échéances de réduction d’émission de gaz à effet de serre pour atteindre la neutralité en 2050 et aux enjeux de santé publique, le PDMIF doit s’articuler autour de la transition écologique des transports et faciliter l’accès à des solutions de mobilités les plus propres pour chacun·e des Francilien·nes.

Piétonniser les centres-villes est une tendance déjà bien développée depuis déjà plusieurs années. Ces aménagements en faveur des piétons contribuent particulièrement à la qualité d’usage des centres urbains, ceux-ci retrouvant une forme d’apaisement. La Région Île-de-France peut s’inspirer des travaux de l’agence d’urbanisme de Bordeaux Aquitaine qui a élaboré une cartographie des distances à pied pour encourager les déplacements piétons. Ainsi, les piétons peuvent évaluer le temps de trajet piéton entre les différents lieux d’une ville ou métropole, dans le cadre du polycentrisme, et avoir une information précise sur le choix à faire entre la marche, le vélo et les transports en commun. 

Le nouveau partage de la voirie implique nécessairement un élargissement des trottoirs pour la marche et la création de grandes voies cyclables dans les villes et entre les villes avec un plan de continuité cyclable imposé aux communes et départements pour en finir avec les pistes en impasse. Dans la décennie à venir, il est nécessaire d’acter la réduction de la place de la voiture dans les espaces publics pour permettre aux modes de réellement pouvoir se compléter.

De plus, réaménager les espaces en faveur des piétons et des cyclistes en diminuant la place des transports motorisés permet de créer un environnement plus convivial susceptible d’augmenter le capital social des individus. Elle participe ainsi au renforcement de l’urbanité entendu comme un caractère propre d’un espace public organisé pour faciliter au maximum toutes les formes d’interaction.

De fait, pour sortir du tout-voiture, il faut s’en donner les moyens et envoyer les bons signaux. Il devient urgent que la Région ne participe plus au financement des axes routiers, sauf en cas d’aménagements exclusivement sécuritaires ou environnementaux (ralentisseurs, voies réservées, murs anti-bruit…) et tout en reconnaissant leurs limites (les murs anti-bruit sont moins efficaces et plus chers à long terme que la réduction de la vitesse). De même, la Région doit favoriser la diminution du nombre de places de stationnement où cela est possible.

Proposition n°7
Une politique de stationnement volontaristeRevoir l’action 9.3.1. du Plan de mobilité 2030 pour abaisser de 50% les plafonds de création de stationnement pour les immeubles de bureaux
La limitation du nombre de places de stationnement dans les entreprises permet d’orienter le choix du mode de transport pour se rendre à son travail vers les modes alternatifs à la voiture particulière. Sont donc définies des normes plafond pour les voitures et deux-roues motorisés dans les immeubles neufs de bureaux, consistant en un nombre maximal de places de stationnement automobile à réaliser, que les constructeurs immobiliers ne doivent pas dépasserLes normes plafond définies dans le plan de mobilité sont trop importantes et permettent de construire encore beaucoup de parkings notamment dans des zones particulièrement bien desservies par les transports en commun. Ainsi il serait possible pour une nouvelle tour à la Défense, de construire des étages de parkings, alors que c’est desservi par 6 lignes de RER, métro ou transilien.
Proposition n°8 
Mise en place de ZTLAjouter au Plan de mobilité une action visant au développement de ZTL, Zones à Trafic Limité” 
Alors que la ZFE du Grand Paris avance lentement, il est un outil qui n’est pas utilisé en Île-de-France et qui permettrait de contribuer à la réduction de la circulation automobile dans les centres-villes : les Zones à Trafic Limité (ZTL). Ces Zones sont utilisées depuis des années en Italie, permettrait de mettre en place un contrôle efficace tout en offrant d’énormes souplesses pour la gestion des ayant·e.s-droits. Ces ZTL en visant explicitement l’usage et non les catégories de motorisation permettent de réduire la circulation motorisée dans les centre-villes et donc de contribuer aux objectifs de réduction des déplacements motorisés, et aux objectifs de favoriser les modes actifs (marche et vélo), en diminuant les conflits et la place accordée aux voies circulées.
Proposition n°9Moratoire routesRéduire le caractère routier de l’ensemble des axes et d’abandonner tous les projets de création de nouvelles infrastructures routières de type voies rapides. 
La hiérarchisation des axes proposée dans le Plan des Mobilités 2030 tend à justifier une conservation des flux automobiles actuels sur le réseau routier. Il est ainsi nécessaire de proposer une hiérarchisation évolutive et dynamique, organisée de l’apaisement général de l’ensemble des axes. De plus, l’objectif de confortement du réseau magistral qui suppose l’augmentation de la capacité de certains axes ainsi que les projets listés de création d’infrastructures routières, sont non seulement anachroniques même viennent en totale contradiction avec les objectifs de ce même plan. Face au dérèglement climatique et aux pollutions de l’air et sonore mettant en danger la santé notamment des plus précaires, il est urgent d’abandonner l’ensemble des projets pro-voitures pour favoriser les reports modaux vers les modes collectifs et actifs.

La logistique

La logistique a connu une forte évolution ces dernières décennies. Les gouvernements successifs ont abandonné le fret ferroviaire et fluvial faute d’investissements et surtout d’un choix politique de favoriser le transport routier qui lui ne paye pas les infrastructures. La part de marché du fret ferroviaire en France est tombée à 9 % en 2019, soit cinq fois moins qu’en 1974 et environ la moitié de la moyenne européenne. Comment ne pas s’inquiéter avec les cheminots de la liquidation de Fret SNCF ? Par ailleurs, on paye aujourd’hui l’abandon de l’écotaxe. La concurrence entre modes de transport est faussée.

Dans les années 1960, le commerce a évolué par le développement des hypermarchés, en périphérie des villes, les clients assurant eux-mêmes la logistique du dernier kilomètre, vidant les centres-villes du commerce de proximité. Aujourd’hui, ce modèle se meurt à petit feu et est remplacé par l’accroissement de l’e-commerce. C’est le modèle économique qui fait qu’un jean fait le tour du monde avant d’arriver chez soi qu’il faut changer. Il faut relocaliser l’économie.

  Alors que les dérèglements climatiques s’accentuent et provoquent des catastrophes, il est impératif de changer d’ores et déjà de politique et de développer 

des alternatives aux transports routiers. Ainsi, nous partageons l’objectif affiché de développer des alternatives logistiques à la distribution centrée autour du poids lourd. Mais nous nous opposons à une conception trop centralisatrice de la logistique, qui émane du document.

  En effet, s’il est souhaitable de développer les frets ferroviaire et fluvial, de même que leur interconnexion, le déploiement de plateformes logistiques gigantesques (Greendock à Gennevilliers, “Connect Paris” aux Batignolles, etc.) concentre beaucoup trop le stockage de transit. Les nuisances provoquées par les flux constants de camions pour les derniers kilomètres sont importantes, en particulier les bouchons qui peuvent complètement paralyser des quartiers entiers. Il faut plutôt privilégier la multiplicité de centres logistiques de proximité – les outils numériques actuels permettant une gestion à la hauteur des difficultés de gestion que cela peut engendrer.

On voit encore les plateformes logistiques s’étendre, consommant de l’espace agricole et naturel. Il faut intégrer dès maintenant le Zéro Artificialisation Nette. Il faut revoir la logique foncière de ces plateformes qui doivent s’installer sur les friches industrielles et commerciales et intégrant une architecture durable, sur plusieurs niveaux.

Il est à déplorer que les ports soient utilisés non pas pour le transport fluvial et ferroviaire, mais pour y installer des entrepôts destinés aux camions. Il faut renforcer l’interopérabilité entre le fer et le fleuve. Le projet de réaménagement des terminaux ferroviaires du MIN de Rungis, par exemple, va dans le bon sens. Le train des primeurs qui livre Rungis en fruits et légumes en provenance de Perpignan a failli disparaître en 2019 et a finalement été relancé, mais il reste en sursis. La Région Ile-de-France doit prendre toute sa part dans l’investissement ferroviaire, comme pour la LNPN reliant Le Havre à Paris.

Concernant le fret fluvial, là aussi l’État ne remplit pas sa mission d’entretien du réseau. Les conventions avec Voies Navigables de France permettent à la Région de participer de manière forte au financement des travaux pour l’entretien des barrages et des écluses qui en ont bien besoin.

Plutôt que de se lancer dans des projets pharaoniques de canaux à grand gabarit comme le canal Bray-Nogent ou le Canal Seine Nord Europe, l’État ferait bien déjà d’entretenir son patrimoine. Les ports d’Île-de-France doivent être des espaces de développement du fret ferroviaire et fluvial. Ils ne doivent pas être détournés de leur objet en construction d’entrepôts pour le fret routier ou des installations industrielles.

La logistique du dernier kilomètre est aujourd’hui assurée par une noria des fourgonnettes et camionnettes, souvent anciennes et polluantes. Pourtant, des alternatives existent et qu’il faut encourager : flottes électriques, cyclo logistique, points relais, drive piéton…

Enfin, il est essentiel de concentrer nos efforts humains et financiers sur les solutions qui ont fait leurs preuves plutôt que sur des projets fantasques qui pourraient s’assimiler à de la gabegie. On pense par exemple aux millions d’euros dépensés par la région dans les projets de drones et autres taxis volants qui, en plus de leurs applications extrêmement restreintes et coûteuses, posent d’importants problèmes de sécurité, de protection des données, d’impact environnemental et de nuisances en tout genre.

La grande couronne

Enfin, nous insistons grandement sur l’absolue nécessité de prioriser l’accès à la mobilité pour les habitant·es de grande couronne, en particulier celles et ceux issu·es de la ruralité. L’uniformisation des tarifs était en ce sens une avancée importante, mais l’essentiel pour laisser la voiture au garage est de garantir l’existence d’alternatives. En ce sens, l’ouverture à la concurrence des bus de grande couronne (étendue progressivement au reste du réseau de transports en commun) a été une décision funeste. On déplore en effet l’irrégularité de l’exécution des marchés par les délégataires sélectionnés : retards, bus fantômes par centaines, lignes modifiées et branches supprimées… 

D’autant plus qu’on commence, très concrètement, à payer le coût de cette ouverture à la concurrence : les premiers versements d’IDFM à ces prestataires déficitaires ont commencé – puisque, finalement, ils ne peuvent pas tenir leurs promesses d’exécution du marché pour le coût promis. On commence à payer la facture, et on a toujours un déficit de bus insupportable dans les départements de grande couronne. Bus qui passent trop peu souvent, dont le service commence trop tard et finit trop tôt, etc.

Enfin, il est aussi essentiel de prioriser les grands projets d’infrastructure structurants pour ces territoires parfois enclavés ou extrêmement mal desservis, en particulier grâce aux trams et trams-trains : T11 et T12 Sud notamment. Le développement du covoiturage, détaillé plus haut, est aussi une option crédible et prometteuse.

Proposition d’amendement du Pôle Écologiste au CA d’IDFM du 14/09/21
Offre de bus en Île-de-FranceTexte de l’amendementLe premier tiret de l’article 2 est modifié comme suit :“- la volonté de poursuivre le renforcement de l’offre bus en Île-de-France, avec l’objectif d’un plan correspondant à une augmentation de 500 1 000 bus ;”

Exposé des motifs
Le développement de l’offre de transports en commun est crucial pour favoriser le report modal nécessaire dans la transition écologique à engager dans notre région, particulièrement en grande couronne où les services sont encore grandement lacunaires. À cet égard, il faut maintenir l’effort pour un plan bus ambitieux qui permettra de développer rapidement des nouvelles offres pour les Francilien·nes.
Par cet amendement, nous proposons de maintenir l’effort au niveau du précédent plan bus, soit une augmentation de 1 000 bus sur la période 2022-2026.

Conclusion

En 2022 en Île-de-France, 23% des habitant·es disaient ne pas avoir la possibilité de choisir entre différents modes de transport et 13% n’avoir même accès à une solution de mobilité, soit 3 points de plus qu’à l’échelle nationale dans une des régions les mieux dotées du monde en termes de transport public. Les inégalités sociales ne font que croître ces dernières années et notre région est malheureusement la plus représentative sur le sujet. Les planifications de notre collectivité en matière d’aménagement du territoire et de mobilité doivent être orientées prioritairement vers la résorption de ces inégalités et l’enjeu essentiel de transition vers des modes de transport plus durables.

Les Écologistes appellent de leurs vœux à mettre les besoins des Francilien·nes au centre de ce nouveau Plan des Mobilités. Pourtant, à ce jour, la concertation est lacunaire, pour ne pas dire inexistante. La démarche de concertation des populations pour saisir les besoins des territoires dans leur diversité n’est pas à la hauteur de l’enjeu : une seule réunion publique, à l’Hôtel de Région, un jeudi 

soir… Tant pis pour les travailleur·euses, les PMR, les habitant·es de grande couronne. Ils et elles n’auront qu’à poster leur contribution en ligne… 

Par cette contribution, les élu·es du Pôle Écologiste souhaitent alerter sur la nécessité d’un débat politique ouvert, concerté et pluriel dans le cadre de ce plan qui dessine l’avenir des mobilités en Île-de-France pour les décennies à venir. 

Date de publication : 13 mars 2025

Document annexe