Rapport sur l’accueil des femmes victimes de violences conjugales et sexuelles dans les commissariats franciliens, ENFIN !

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Depuis des années, les écologistes à la région Ile-de-France se battent pour améliorer les conditions d’accueil des femmes victimes de violences conjugales et sexuelles dans les commissariats franciliens et pour la formation des policier·ères et gendarmes·ettes pour accompagner les victimes.

Commandé en 2018 par la Préfecture de Paris au Centre Hubertine Auclert (CHA), le rapport sur l’accueil des femmes victimes de violences dans les commissariats vient ENFIN d’être publié. Le rapport était prêt depuis 2019 mais la Préfecture de Paris a considérablement retardé sa publication.

Nous le redoutions, les résultats sont alarmants et les conditions d’accueil des victimes doivent être drastiquement améliorées. Dans son rapport, le CHA a émis 9 recommandations/bonnes pratiques :

  1. RECOMMANDATIONS GENERALES : Centrer l’action de police sur la sécurité de la victime et favoriser la confidentialité à toutes les étapes (intervention à domicile, accueil, prise de plainte et enquête), développer un plan de formation continue par commissariat et prévoir des temps d’informations une fois par an en interne sur le traitement des situations de violences conjugales ;
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  2. AMÉLIORER L’ACCUEIL ET LE PRÉ-ACCUEIL AU COMMISSARIAT : Favoriser la confidentialité dès le pré-accueil et au comptoir d’accueil, proposer dès l’accueil pendant le temps d’attente des plaquettes d’informations, faciliter l’accueil inconditionnel pour prendre une plainte, rendre possible l’accueil et l’audition par une personne de même sexe si la demande est clairement formulée par la victime, généraliser dans chaque commissariat la mise en place d’un « pôle psychosocial », proposer systématiquement un dépôt de plainte plutôt qu’une main courante pour des faits de violences conjugales y compris pour des faits de violences psychologiques et généraliser la mise en œuvre du protocole de traitement des mains courantes pour violences conjugales parisien.
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  3. AMÉLIORER L’AUDITION : Prévoir dans chaque commissariat une salle pour les auditions sensibles, proposer systématiquement à chaque femme victime de violence si elle souhaite être entendue dans un cadre confidentiel, rendre possible l’audition par une personne de même sexe si la demande est clairement formulée par la victime, rendre possible la prise de rendez-vous, veiller à la confidentialité de l’audition, généraliser un masque de plainte pour violences conjugales, inclure si possible la prise de photo au moment du dépôt de plainte et ou lors d’une intervention domicile, systématiser la réquisition aux Unités Médicaux-Judiciaires (UMJ) à l’issue d’un dépôt de plainte, y compris en l’absence de traces visibles, y compris pour des violences sexuelles anciennes, systématiser la demande de l’évaluation du retentissement psychologique dès la première réquisition faite auprès des UMJ, systématiser la collecte des preuves numériques et s’assurer qu’elles soient en bonne qualité et en faire une copie, encourager la victime de violences conjugales à déposer plainte, proposer une plainte complémentaire spécifique en cas de violences sexuelles dans le cadre du couple, proposer une plainte complémentaire spécifique pour des faits de violences exercées à l’encontre des enfants, prévoir un masque de plainte pour violences sexuelles pour les services de pôle plainte, utiliser et remplir à la fin de chaque audition une grille d’évaluation du danger, et spécialiser une brigade unique pour les prises de plainte et les enquêtes pour violences conjugales et/ou sexuelles ;
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  4. AMÉLIORER LA POST-AUDITION : Utiliser le mémo (cf. infra, annexe 4) à remettre à l’issue de plainte pour « violences conjugales » afin de lui donner des informations sur la procédure et des contacts utiles pour les démarches à engager pour se protéger, développer l’assistance aux victimes à la fin de l’audition, compléter l’information des victimes, faciliter la mise à l’abri des victimes, faciliter le transport des victimes aux UMJ, ne pas imposer aux victimes la confrontation, et créer une brigade spécialisée uniquement pour les violences conjugales et/ou sexuelles avec prise de plainte et enquête en flagrance et en préliminaire.
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  5. AMÉLIORER L’INTERVENTION AU DOMICILE POUR DES FAITS DE VIOLENCES CONJUGALES : Centrer l’intervention sur la sécurité de la victime, systématiser la recherche des antécédents lors d’un appel 17, suivre les étapes de la fiche-réflexe (cf. infra, annexe 3) concernant la prise en charge des victimes lors d’interventions au domicile, incluant aussi la prise en compte des enfants, développer une attitude bienveillante et adaptée à l’égard des enfants co-victimes de violences conjugales, accompagner la rédaction d’une main courante ou PVRJ suite à une intervention à domicile pour violences conjugales (en cas de présence d’enfants au domicile), généraliser le protocole féminicide impliquant la prise en charge adaptée immédiate des enfants suite à un homicide conjugal, harmoniser la rédaction des gestions d’événements pour « différends conjugaux » et/ou « différends familiaux », systématiser l’appel par la Brigade locale de protection de la famille (BLPF) de la victime dans les 48 heures afin d’orienter vers un dépôt de plainte et d’informer la victime sur les ressources d’aides disponibles, inclure les interventions au domicile pour violences conjugales dans le tableau de bord du commissariat pour violences conjugales, organiser des réunions d’informations et d’échanges entre services (incluant les brigades police secours) ce qui leur permettrait d’avoir accès aux suites des interventions (mesures d’éloignement du mis en cause par exemple), et rappeler et faire connaître les dispositifs de soutien psychologique pour les policiers et policières suite à des situations de violences conjugales qui ont pu les affecter ;
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  6. AMÉLIORER LE PROTOCOLE CADRE RELATIF AU TRAITEMENT DES MAINS COURANTES ET DES PROCES-VERBAUX DE RENSEIGNEMENT JUDICIAIRE EN MATIERE DE VIOLENCES CONJUGALES : Généraliser ce protocole à l’ensemble des commissariats, avec quelques améliorations, utiliser une trame de main courante pour violences conjugales incluant des questions simples (antériorité des faits par exemple) sur l’évaluation du danger et permettant de mieux caractériser les faits notamment de violences sexuelles, partager un tableau de suivi des mains courantes pour violences conjugales entre le BCO et la BLPF et organiser chaque année une rencontre-bilan avec la BLPF et les associations spécialisées dans l’accompagnement des femmes victimes de violences du territoire.
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  7. AMÉLIORER LE LIEN AVEC LES ASSOCIATIONS SPÉCIALISÉES : signature d’un protocole de partenariat entre le commissariat et les associations spécialisées : précisant le rôle et les engagements de chacun·e, rendre possible la prise de rendez-vous pour un dépôt de plainte à la demande d’une association, la présence physique en soutien d’une association au moment d’une audition (si c’est le souhait de la victime) et sans que l’association ne prenne la parole, organiser la remontée des éventuels dysfonctionnements dans l’accueil des femmes victimes de violences, identifier un « point contact » au sein des BLPF qui pourrait répondre régulièrement aux demandes des associations d’information concernant les suites d’une plainte, prévoir au moins une réunion par an avec les associations spécialisées, rendre possible et prévoir des sessions d’immersion des associations dans les commissariats, expérimenter une permanence police dans les associations spécialisées et/ou faciliter le déplacement d’un personnel de la police pour réaliser une audition de plainte sur place pour des situations jugées sensibles (psychotraumatismes, danger, …), et organiser une visite de la police dans les associations spécialisées ;
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  8. AMÉLIORER LE LIEN AVEC LES PARTENAIRES DU TERRITOIRE (UMJ, HOPITAUX, …) : Encourager la participation de la cheffe et ou du chef de la BLPF aux réunions de réseaux locaux sur les violences faites aux femmes, et faciliter la prise de plainte pour les victimes qui s’adressent directement à des centres médicojudiciaires, des hôpitaux ou maternités.
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  9. AMÉLIORER LES LIENS AVEC LES SUBSTITUTTES ET SUBSTITUTS DU OU DE LA PROCUREURE : Organiser des rencontres physiques régulières des BLPF avec les substitut·es en charge des violences conjugales notamment, incluant des échanges sur les suites données à des dossiers suivis sur l’année.

Nous saluons le travail du Centre Hubertine Auclert et remercions la mobilisation et la ténacité des féministes pour avoir réclamer sans relâche sa publication.

Télécharger ici le rapport

Télécharger la grille d’évaluation du danger lors d’une audition pour violences conjugales

Date de publication : 28 janvier 2022